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Battaille citoyenne au boisé Des-Hirondelles
6 mars 2023
C’est depuis près de 30 ans que l’avenir du boisé Des-Hirondelles à Saint-Bruno-de-Montarville en Montérégie est en ballotage entre ceux qui veulent le protéger et le propriétaire du terrain, qui lui désire y construire des maisons de prestiges.
En mai 2011, une citoyenne de Saint-Bruno-de-Montarville, Catherine Mondor, accompagne deux biologistes réputés, Tanya Handa et Daniel Gagnon, pour réaliser un inventaire écologique du boisé Des-Hirondelles. Le secteur est menacé par un projet de lotissement proposé par le sénateur Paul Massicotte (Sommet-Prestige-Canada). Le promoteur a fait préparer deux études afin d’obtenir un certificat d’autorisation du ministère de l’Environnement québécois. Un rapport de la firme Dimension-Environnement, en mars 2008, et un autre de SNC-Lavalin, en avril 2011, mentionnent qu’il n’y a pas d’espèces menacées dans le boisé.
Or, dans un rapport transmis le 23 mai 2011 au ministère de l’Environnement, les biologistes Handa et Gagnon affirment le contraire : ils ont répertorié sur les lieux plusieurs plants de ginseng à cinq folioles (panax quinquefolius), une espèce menacée au Québec. Le Ministère demandera alors au promoteur de procéder à des caractérisations supplémentaires du site. Dans son rapport préparé en septembre 2012, la firme Biome-Environnement confirme la présence du ginseng à cinq folioles.
Fait à noter, la Cour Supérieure du Québec écorche SNC-Lavalin dans une décision rendue quelques jours avant le dépôt du rapport de Biome-Environnement. Dans une affaire où elle doit décider si elle accorde ou non une injonction afin de forcer le promoteur à stopper son projet, la juge Nicole Gibeau prend note des rapports contradictoires déposés au ministère de l’Environnement. « Le T
ribunal estime que la firme SNC-Lavalin n’a peut-être pas été en mesure de répertorier cette espèce menacée sur le site puisque son observation a eu lieu avant les premières floraisons printanières », écrit-elle.
Éric-Pierre Champagne, journal La Presse.
Le 8 mars 2023
Défaite de la Ville au boisé Des-Hirondelles.Saint-Bruno-de-Montarville devra indemniser l’entreprise Sommet-Prestige-Canada concernant le boisé Des-Hirondelles.
Depuis 2014, l’ancien maire de Saint-Bruno-de-Montarville, Martin Murray, a mené un combat de chaque instant afin de protéger l’endroit. Ce dernier espérait que le ministre de l’Environnement interdirait le développement en vertu de la Loi sur la conservation du patrimoine naturel. Ainsi, il aurait été impossible au promoteur de construire sur son terrain qui aurait été protégé sans que la Ville n’ait quoi que ce soit à débourser. La Ville a réussi à rendre le projet impossible en mars 2018, dans la foulée de l’entrée en vigueur du schéma d’aménagement et de développement (SAD) de l’agglomération de Longueuil, en adoptant une série de règlements d’urbanisme dont plusieurs dispositions ont pour objectif d’assurer la protection des milieux humides et boisés se trouvant sur son territoire. On y retrouve la nouvelle réglementation de la Ville qui encadre sévèrement la coupe d’arbres dans le but de protéger le couvert forestier de la forêt privée. Sommet-Prestige-Canada voit là une expropriation déguisée de la part de la Ville, et c’est contre cette règlementation que la société immobilière poursuit la Ville devant les tribunaux.
Rappelons qu’une cause similaire a vu s’opposer la Ville de Saint-Bruno et Pillenière-Simoneau, un promoteur immobilier qui voulait réaliser un projet de développement résidentiel dans le boisé Sabourin. Une cause perdue en première instance par le promoteur, qui avait porté la cause en appel avant que la Ville trouve une entente hors cour. Le boisé Sabourin a finalement été acheté par la Ville au prix de 8 millions de dollars, un prix assumé par la Ville de Saint-Bruno et la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM). Sommet-Prestige-Canada (SPC), propriétaire du boisé Des-Hirondelles, une société immobilière dirigée par le sénateur Paul-J. Massicotte, gagne son procès contre la Ville de Saint-Bruno-de-Montarville et pourra demander à la Ville «
une indemnité applicable en matière d’expropriation » pour le boisé Des-Hirondelles où la compagnie avait un projet immobilier de luxe que la Municipalité ne voulait pas afin de protéger le boisé. Cette indemnité pourrait s’élever à plusieurs dizaines de millions.
Dans ses conclusions le juge de la Cour Supérieure du Québec Lukask Granosik explique clairement «
Qu’un organe gouvernemental peut très bien changer de politique, élire de nouveaux dirigeants et modifier ses objectifs collectifs. Il s’agit par définition de l’expression démocratique parfaite de notre système de gouvernance. Toutefois, cette même collectivité doit assumer les conséquences de ses choix et ne pas faire porter à un seul citoyen les effets de ses décisions, peu importe leur légitimité ou leur opportunité, en l’absence de législation explicite qui l’autorise. » Le juge indique d’autre part que toutes les règlementations passées sous l’ancienne administration Murray pour protéger le boisé Des-Hirondelles ont pour effet «
d’exproprier » Sommet-Prestige-Canada. Il précise que «
la désignation du boisé Des-Hirondelles en tant que « milieu naturel protégé » (…)
a été introduit hors du délai raisonnable et est, pour ce motif, irrecevable. »
La Ville de Saint-Bruno-de-Montarville a indiqué dans un communiqué prendre « l
’acte du jugement rendu par la cour supérieure du Québec et qui conclut à une expropriation déguisée. La Ville souhaitait protéger ce milieu naturel précieux en bordure du parc national du Mont Saint-Bruno, qui possède, entre autres une espèce végétale menacée, le ginseng à cinq folioles. »
Le maire de Saint-Bruno, Ludovic-Grisé Farand n’a pas souhaité réagir à la décision sachant le dossier judiciarisé. «
La Ville et le conseil municipal prendront le temps nécessaire pour bien analyser ce jugement et en mesurer la portée. Soyez assuré qu’une fois le processus judiciaire terminé, je vais commenter ce dossier majeur que nous héritons de l’administration Murray », a-t-il simplement mis de l’avant.
Frédéric Khalkhal, hebdo Les-Versants.
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